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Journée d’études • Danse et altérité. Renouvellements politico-esthétiques de la danse en occident, 15 novembre 2013, Toulouse

Danse et altérité. Renouvellements politico-esthétiques de la danse en occident.

Journée d’études le 15 novembre 2013

À l’université de Toulouse-Le Mirail : maison de la recherche et la Fabrique

L’un des enjeux majeurs en danse aujourd’hui, qui fournit aux chercheurs une voie d’exploration riche et variée, est la question du renouvellement des esthétiques. L’histoire de la danse témoigne ainsi de plusieurs périodes d’interrogation, de stagnation, où émerge régulièrement l’idée d’une création en déclin, d’une grande difficulté pour les chorégraphes à se renouveler, à un moment où les « inventions » d’une période en cours d’achèvement se figent en un nouveau « classicisme » voire en académisme. Or la création en danse n’est vivante que par l’apport de pratiques extérieures, nouvelles, inattendues, parfois marginales, qui viennent bousculer des acquis mués en certitudes.

Nous nous proposons d’explorer ces « moments » de l’histoire de la danse où, précisément, la marge ou la nouveauté est venue déranger, déplacer le centre, participant ainsi du dynamisme de la création chorégraphique. Les voies et les moyens de ce renouvellement des esthétiques sont très divers : cette diversité sera le premier objet de notre recherche commune.

Plusieurs axes se dessinent d’emblée : un renouvellement passant par la réinterrogation et l’appropriation par la scène des danses populaires. C’est vers des formes comme le hip hop, le Krumping, les Funk styles (locking, popping), la House Dance, et vers des pratiques que l’on retrouve dans les clubs ou les dancings, où s’inventent de nouvelles techniques corporelles, que les chorégraphes se tournent aujourd’hui pour faire évoluer leur propre créativité. Le phénomène d’interrogation régulière des formes stables par des apports extérieurs est propre à plusieurs périodes : dans l’Antiquité, il fut à l’origine de l’invention du « ballet » nommé pantomime, qui fut, de fait, la synthèse artistique de plusieurs inventions musicales et orchestiques d’origine souvent populaire du 1er siècle av. J.-C. Au XIXe et au début du XXe siècle, la scène a été confrontée aux « danses exotiques (cf. Anne Decoret), confrontation qui fut l’un des creuset de la danse moderne. On constate aussi que c’est le cinéma, forme artistique nouvelle, qui véhicule dès les années 20 certaines formes populaires de danse (le phénomène se renouvelle dans les années 80 avec le hip hop et amplifié avec la télévision). Dans ce contexte, le cinéma s’intéressant à des formes nouvelles contribue à la création de stéréotypes. Pour préserver la créativité de son art, revient alors au chorégraphe le devoir d’être attentif à l’intégrité de sa propre pratique, et à échapper aux stéréotypes ainsi créés, en se renouvelant. Du point de vue esthétique, en outre, la re- présentation de la danse au cinéma pose plusieurs questions : qu’en est-il de l’écriture cinématographique qui se structure autour de cette intégration de la danse populaire, intégration marginale ou dominante, qui structure ? Dans l’autre sens, comment la danse profite-t-elle de cette intégration et de ce médium d’accueil pour devenir visible, pour affirmer une identité, et en amont, pour impliquer une perception particulière de la part du spectateur ?

D’autres thématiques, moins explorées, surgissent à propos du lien danse/cinéma. La place du cinéma dans l’art chorégraphique, sur la scène de danse, sur la scène de danse-théâtre et au sein de performances qui convoquent l’art chorégraphique . On cherchera à identifier, sur la scène chorégraphique et dans les moments dansés de la scène théâtrale, les éléments qui suggèrent une influence du modèle cinématographique. On se demandera de quelle façon, en définitive, on peut évaluer les définitions de la « cinématographicité » dans le champ de la danse. Cette influence pourra être étudiée :

en termes de contenus (topoi, personnages stéréotypés…), de genres cinématographiques, de références (citations de films, pastiches…), d’imitation de pratiques de l’image issues du cinéma.
en termes de transfert d’écriture du cinéma à la danse. Dans cette réflexion sur l’influence du cinéma dans la danse, sur la cinématographicité de la danse, pensée comme partie prenante de la création et de la réception, il convient aussi d’interroger l’influence de l’écriture cinématographique sur le danseur lui-même, sur son corps et sur la perception qu’il a de son art.

On peut également considérer la danse comme un modèle ou un objet de désir pour les autres arts du spectacle (théâtre mais aussi performance et cinéma) afin de ne pas travailler sur le seul corpus chorégraphique. On pourrait également parler de l’ouverture de la danse à d’autres arts que le cinéma : littérature, poésie, arts plastiques, vidéo - (voir la thèse en arts du spectacle d’Anne Pellus, Politiques de l’hybride dans la danse contemporaine)

Au niveau social : ce renouvellement passe également par des voies nouvelles, ouvertes et confortées par de nouvelles aspirations sociales. Ainsi le renouvellement esthétique est-il apparu à travers des mouvements portés par des femmes ou par des idées féministes ou encore habités par la question des genres, identités sexuelles et sexualités, (voir JE récente sur « danse et genres » à Lyon) et des mouvements contestant certaines formes de ségrégation sociale comme le racisme (cf. par ex. Le New Dance Group aux Etats- Unis). Nous nous proposons d’interroger le lien fort qui a existé entre ces aspirations sociales et le renouvellement des esthétiques en danse.

Au niveau culturel : le renouvellement passe aussi par des phénomènes de « métissage » : la danse occidentale contemporaine se nourrit et se transforme au contact des danses, mais aussi des pratiques du mouvement, venues d’Orient (au sens large) . Un premier exemple en est l’ensemble des techniques corporelles d’origine asiatique (ayant leurs sources en Inde et en Chine) : arts martiaux, postures du hatha-yoga (le yoga corporel), techniques de respiration … Ces techniques corporelles sont une source d’inspiration de la danse, d’autant plus riches qu’elles relèvent en même temps d’une voie spirituelle plusieurs fois millénaire (voir entre autres les traditions taoistes, tantriques, bouddhiques et hindoues). Il s’agit tout simplement de l’éveil ou du perfectionnement de l’être humain, passant par un travail d’unification entre corps, âme et esprit, qui permette à la danse contemporaine occidentale de se renouveler en développant la profondeur de ses propres pratiques corporelles, en général en passant par des formes d’intériorisation du mouvement.

Un deuxième exemple en est le retour aux sources qu’opère la danse occidentale contemporaine en « redécouvrant » (c’est-à-dire en reconnaissant explicitement) les différentes danses issues du continent africain, qui sont les premières , historiquement, de notre culture mondiale. Ces danses renvoient, comme dans le cas des techniques corporelles venues d’Asie, à une vision complète de l’être humain, mais aussi du monde dans lequel nous vivons, envisagé non pas comme lieu de conquête, mais comme source principale d’inspiration, à la fois spirituelle (traditions animistes) et esthétique (influence profonde des mouvements des animaux et des éléments de la nature – terre, eau, feu, air/vent –, entre autres, sur les danses humaines).

•> Plus d’informations prochainement sur le site de l’UTM

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